BURKINA FASO - L’alphabétisation dans l’univers carcéral : une contribution à la réintégration des détenus dans la société
A la faveur d’un projet de développement financé par les Gouvernements du Grand-Duché de Luxembourg et du Burkina Faso à l’Ouest du Burkina Faso, la requête d’un opérateur en alphabétisation (association) a été agréée pour l’ouverture d’un centre d’alphabétisation de fortune dans une maison d’arrêt et de correction communément appelée prison civile. Ce centre a accueilli une trentaine de détenus pour des sessions d’alphabétisation. Ces sessions ont été consacrées à l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et au calcul en langue nationale dioula ainsi qu’à la reconnaissance d'images représentant les principaux éléments intervenant dans la gestion d’une exploitation agricole. A ces images sont ensuite associés des mots que les participants apprennent à reconnaître et à employer pour le remplissage des documents de gestion (fiche de stock, fiche de prévision, …). Les sessions ont été dispensées suivant une approche pédagogique active axée sur des méthodes participatives qui font de l'apprenant à la fois l'acteur et le bénéficiaire de la formation avec pour objectif de lui permettre de gérer une petite exploitation agricole.
Au terme de cet apprentissage, les apprenants ont pu se familiariser avec les unités de mesures (mètre, mètre carré, poids), effectuer des exercices pratiques d'utilisation du mètre ruban et de la bascule et apprendre également à utiliser la calculatrice. Les exercices pratiques ont été consacrés au maraichage et ont été conduits sur des lopins de terre à l’intérieur de la prison. Les récoltes issues de ces parcelles de démonstrations ont été utilisées pour améliorer l’alimentation des détenus et des montants symboliques remis à chaque apprenant.
Ces sessions ont connu une grande réussite : il n’y a eu aucune déperdition. Cette situation s’explique par le fait que le centre d’alphabétisation représentait pour les détenus le seul espace de liberté et ce au regard de leurs dures conditions de détention. En plus de cela, l’apprentissage à travers l’alphabétisation fonctionnelle leur a permis d’acquérir des compétences et de préparer leur retour à une vie normale. Parmi ces détenus, il y avait un jeune homme prénommé Kalo, âgé de 20 ans qui, a sa sortie de prison, a pu s’installer à la périphérie de la ville pour y produire et vendre ses produits maraîchers. Pour lui, la prison lui a permis d’apprendre à lire, écrire et calculer et à produire ; cela lui a permis de réintégrer la société qui lui porte un autre regard. Selon Kalo, si un jour il devait retourner en prison, ce ne sera pas comme détenu, mais, pour aider les autres à s’en sortir. Cette expérience montre la nécessité de mettre l’accent sur la dimension fonctionnelle de l’alphabétisation qui dans ce cas-ci a contribué à humaniser ce lieu de détention pour en faire un espace de liberté, d’apprentissage, de reconversion et de réintégration dans la société. L’alphabétisation peut être une source inductrice de compétences et de dynamiques de transformations porteuses de renouveaux socioéconomiques et de développement local. Des Kalo, il en existe par milliers, il faut juste leur donner leur chance.
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